Durant la pause hivernale, Retrouvez chaque vendredi sur Littoralfoot.ch l’interview exclusive d’un joueur de la région. Pour ce deuxième numéro, Nicola Noseda, Arrivé cet été à Audax en provenance de Boudry nous a accueilli à Pierre-à-Bot. Entretien avec le Tessinois, qui a débuté sa carrière à Chiasso et joué à Yverdon-Sport lors de la saison 2005-2006 en Super League.
Peux-tu te présenter pour ceux qui ne te connaissent pas ?
je m’appelle Nicola Noseda, j’ai 38 ans. Je suis Tessinois, j’habite dans la région depuis 2002 ou 2003. Je suis chef de secteur pour Securitas SA. Je suis défenseur à l’ASI Audax-Friul.
Comment le football est venu à toi ?
C’était l’époque de Maradona, du Milan de van Basten, Rijkaard et Gullit, de l’inter de Matthäus, Brehme et Jurgen Klinsmann. Je trouve qu’il y’avait pas d’autres sports à regarder quand on avait 7 ans dans les années 90 donc voilà.
Plus jeune, tu avais une idole ?
Cafu!
Parle-nous de ton parcours ?
J’ai fait tous mes juniors au Tessin, au FC Chiasso d’abord puis au FC Lugano dès les M17 puis j’ai intégré la première équipe de Chiasso avec laquelle j’ai débuté en première équipe à 16 ans. Puis j’ai fait 3-4 saisons en Ligue Nationale B puis je suis parti à Yverdon Sport avec Roberto Morinini en 2005. Par la suite je suis retourné au foot régional parce que je n’avais plus l’envie. Je suis venu à Espagnol NE en 3e Ligue puis je suis allé à Boudry où j’ai été capitaine pendant 8 ans et maintenant, le coach m’a convaincu de faire une dernière saison ici à Audax malgré mon âge (rires).
A 22ans, tu signes à Yverdon Sport et tu joues en Axpo Super League, que retiens-tu?
Il y aurait tellement à parler, il y a beaucoup, beaucoup à retenir. Mais ce qu’il faut retenir c’est que le football c’est une école de vie. Parce que tu fais partie d’un groupe, tu fais partie d’une dynamique qui n’est pas individuelle et on te lâche dans un monde quand tu es tout jeune où il y a de l’hypocrisie. Faut se battre, il ne faut rien lâcher. On te dit une chose et de l’autre côté on te poignarde. Il faut essayer de trouver les solutions par toi-même. Tout le monde est contre tout le monde mais voilà. La chose qu’il faut retenir c’est une école de vie qui te sert part la suite. J’ai eu la chance de jouer dans certains des plus beaux stades en Suisse avec de bons joueurs qui ont fait également des Championnats du monde. Mais je pense que je suis peut-être arrivé trop jeune. Il y a aussi un petit peu de regrets, car tu arrives là, tu fais une saison et après on coule. On coule sur le dernier match alors qu’on gagnait 1-0 et après on perd 1-3. On a pris trois buts en deuxième mi-temps. Il n’y a pas de regret mais il y a peut-être une chose que je ne me suis jamais pardonnée: c’est que je suis arrivé là et que je n’ai pas réussi à faire mieux. C’est vrai qu’à 22 ans on a un niveau de connaissances qui n’est pas le même qu’à 38. Aujourd’hui il y a aussi d’autres facteurs qui ont joué en ma défaveur. Mais voilà c’est une école de vie, c’est ma réponse.
Après la relégation en Challenge League, tu pars à Baulmes, pourquoi ce choix ?
Tout simplement parce que Didi Andrey est arrivé au poste d’entraineur et il ne me supportait pas. Il ne pouvait pas me voir. Il n’y a rien d’autre à dire que ça. Il a tout fait pour me faire partir. Il savait que j’avais une clause dans mon contrat qui était liée à mon temps de jeu sur le terrain. Il était aussi là en Ligue A, mais M. Morinini m’avait demandé en décembre qu’est-ce que je voulais faire. Lui il voulait que je reste et moi je voulais rester parce que je voulais continuer à évoluer et Didi Andrey a utilisé ça pour me pousser à la porte. Donc le feeling n’a jamais passé avec lui. Il y avait des injustices, il y avait des joueurs qui ne s’entrainaient pas qui jouaient latéral droit à ma place et il y avait des défenseurs centraux qui jouaient aussi à droite. Ils devaient jouer parce que c’était des étrangers. Bref voilà. Du coup, Monsieur Salvi, président du FC Baulmes et M. Barberis qui était l’entraîneur du club et que j’aimais bien, sont venus. M. Barberis, c’est un dur, mais il m’a dit que j’étais le type dont il avait besoin et il est venu me chercher. Je suis resté dans la même ligue. Viser plus haut c’était impossible pour moi.
As-tu rencontré des difficultés hormis celles que tu viens d’évoquer dans ta carrière? Ou des blessures ?
Non, sinon on n’arrive pas jouer jusqu’à 38 ans. On catégorise souvent les joueurs en 2 parties. Il y a celui qui a le pain et celui qui a les dents. Moi j’étais 100% celui qui avait les dents. Je n’ai jamais eu une blessure grave dans ma vie. Physiquement j’étais vraiment bien et j’étais quelqu’un qui écoutait. Malheureuse cela s’est perdu avec le temps. Maintenant les jeunes ne t’écoutent plus, ils savent tout. Ils jouent à la Playstation, ils savent tout. Moi j’avais cette capacité d’écouter et apprendre de chacun. Donc non, je n’ai pas eu de blessure. Je pense qu’après par contre mes limites techniques ont fait que je n’ai pas pu continuer à évoluer à un certain niveau.
Actuellement tu es défenseur central, tu as toujours évolué à ce poste ?
Non. Je suis né latéral droit, c’est pour cela que Cafu est mon idole. J’ai joué latéral droit jusqu’à mon arrivée dans le football amateur, je me rappelle même qu’à Espagnol NE je jouais milieu. Je pouvais me le permettre car j’avais un rythme plus élevé. Quand je suis parti à Boudry, je devais jouer dans la 2e équipe parce qu’une grosse partie des joueurs qui étaient à Espagnol NE étaient partis. Et Paraiso m’a dit: «viens en 3e Ligue avec la 2e équipe» et j’ai répondu ok. Ensuite j’ai fait un entrainement avec Grossin et j’ai fait un match le lendemain et il m’a dit «toi tu restes avec moi et j’ai besoin d’un défenseur central» et j’ai répondu: «ok».
Quelles sont les qualités que requiert un bon défenseur?
Aujourd’hui, la première chose c’est le physique. On regarde partout, si tu n’es pas physiquement présent, athlétique, tu ne vas nulle part. Après, ça dépend du championnat où tu joues. Quand tu regardes au niveau des régions, on voit que la Suisse romande sait bien jouer au foot. Au Tessin, on est influencé par ce qui se passe de l’autre côté de la frontière, c’est plutôt tactique. Les Suisses alémaniques, c’est la niaque, c’est l’engagement, etc. Aujourd’hui il n’y a pas photo, pour jouer à ce poste il faut avoir un petit peu de tout. Il faut aussi se concentrer sur ses qualités. Par exemple, j’ai joué avec Diango Malacarne qui a joué en Bundesliga, lui il me disait: j’étais fort avec la tête, donc j’ai joué toute ma carrière avec la tête. Aujourd’hui tu dois être bon partout. Le physique c’est le B.-A ba. Si tu as un petit peu de cerveau c’est pas mal aussi. Il y a 15 ans, je dirais qu’on était moins athlétiques, si on prend les champions des années 90 et 2000, tu les mets aujourd’hui je ne sais pas ce que ça donne.
Cet été tu signes à Audax en provenant de Boudry tout comme tes entraîneurs, c’était un choix de les suivre ?
On m’a proposé de faire une dernière saison, ça fait quelques années que je songe à arrêter. D’un côté, le physique, il suit. Le niveau me le permet. Je trouve que le niveau stagne, car si j’arrive jouer à 38 ans c’est qu’il y a un problème. C’est peut-être aussi un problème des attaquants en face (rires). Arrêter sur une saison avec le COVID où on n’a pratiquement pas joué, ça ne m’aurait pas plu. C’était exclu que je finisse là-dessus. A la base mon rôle, quand tu as mon âge, il est défini par l’expérience, par mon caractère, il faut être le leader du vestiaire peu importe si tu joues ou si tu ne joues pas et être le trait d’union entre ce qu’il se passe entre le staff, ça peut être les entraineurs mais aussi les différents interlocuteurs de toute la société. Damien Vauthier a arrêté et on se retrouve aujourd’hui avec un qui doit faire tous les matches. Tant qu’il reste du plaisir ça joue. Il reste encore une coupe à aller chercher en 2022.
A 38 ans et avec plus de 90 matchs dans la Swiss Football League, qu’apportes-tu aux jeunes de ton équipe ?
Alors ça c’est une question qu’ils faut poser aux jeunes. Je sais ce que moi je veux faire, je veux apporter ces petits conseils, ces petits détails qu’aujourd’hui font la différence: placement du corps, l’importance de la parole, de la communication. Je suis quelqu’un où il n’y a pas de gris, soit c’est blanc soit c’est noir. Sois tu fais soit tu ne fais pas. D’ailleurs ils ont rigolé parce que j’ai pris Yoda comme exemple. Pour moi essayer n’existe pas, il faut être à 100% tout le temps, il faut montrer qu’on peut être des professionnels même en 2e Ligue. Si tu veux apprendre ou progresser il y a qu’une seule chose à faire c’est le travail, il n’y a pas de miracles. J’espère être une référence. Il serait intéressant de voir avec les autres joueurs si c’est le cas.
Tu penses que les jeunes t’écoutent ?
Il y en a qui écoutent plus, d’autres moins. C’est une génération difficile, je suis aussi père. Les jeunes doivent aussi avoir l’intelligence de comprendre que quand on fait des remarques c’est dans un but qui est beaucoup plus grand que la petite remarque, c’est vraiment pour progresser pour s’améliorer. Parce que nous on réfléchit et on a du vécu. Il y en a des qui écoutent, d’autres n’écoutent pas et avec certains je vais au clash, je le répète c’est mon rôle. Si ça ne se passe pas bien j’ai le statut pour gueuler.
Revenons à Audax, vous êtes 6e à 12 points du leader Saint-Imier, est-ce votre bonne place ? ou qu’a-t’il manqué pour viser plus haut ?
Je suis d’avis pour qu’une équipe est tout le temps à la place à laquelle elle devrait être. Il n’y a pas de on aurait dû on n’aurait pas pu. A la fin du championnat tu es exactement où tu dois être. Donc aujourd’hui on est là où on doit être. Pourquoi? Parce que on fait des bons résultats, on a joué avec nos caractéristiques mais en y mettant toute la panoplie des caractéristiques sur le terrain. Audax est une équipe qui joue au foot comme c’était aussi le cas à Boudry avant. Il ne faut pas oublier l’engagement, les couilles, le cœur, tout ça, il ne faut pas oublier. On a fait des grosses performances, on élimine Béroche-Gorgier de la Coupe, on perd là-bas 1-0 mais ça aurait pu basculer, on gagne 4-0 contre Saint-Blaise, on bat Bôle qui est sur le papier une très forte équipe et de l’autre côté, le manque d’expérience, le manque de rigueur, notre match contre Saint-Imier, notre match contre Coffrane, notre match contre Le Locle. Bref, c’est la continuité. On a terminé le premier tour comme on devait le terminer.
Quels sont désormais tes objectifs pour la saison à venir? voir plus?
Pour moi c’est juin, l’objectif il est clair, c’est d’aller gagner la Coupe. Un autre objectif c’est celui de se rapprocher le plus vite et le plus longtemps possible du haut du classement. Car arriver au mois d’avril et être dans le ventre mou du classement ça fait chier tout le monde. Les motivations, même si ça ne devrait pas être le cas. Si on parle des jeunes, la présence aux entrainements va fluctuer. Ne pas oublier qu’il faut préparer la saison prochaine, pas moi mais les jeunes oui. Pour moi il faudra voir comment je me sens, pour moi c’est de mois en mois, de semaine en semaine et de jour en jour. Je sais que le projet ici est important, l’objectif du club c’est d’arriver en Première Ligue sur les 10 prochaines années. Je sais aussi que tout le staff, les dirigeants, sont en train de promouvoir la formation des jeunes. Nous voulons garder les juniors A, B et C en inter, histoire de faire le lien entre l’élite et le régional donc peut être que mon futur sera sur le terrain en train de coacher. Quand on fait tellement de foot dans sa carrière c’est difficile de dire stop et c’est fini. Ce que je sais c’est que je ne vais continuer en séniors ou en vétérans, cela ne m’intéresse pas. Quand je stopperai le foot je stopperai pour de bon.