Le revers 16-1 concédé par Coffrane II à Saint-Aubin samedi dernier, face au FC Béroche-Gorgier, en 2e ligue neuchâteloise, a fait couler beaucoup d’eau sous les ponts de l’Areuse et du Seyon.
Rappel des faits: la «deux» de Coffrane s’est présentée avec huit joueurs au coup d’envoi du match de 2e ligue contre Béroche-Gorgier, au Bord du Lac, avant de terminer la rencontre à neuf. Une «plaisanterie» qui n’a guère plu dans le microcosme du football neuchâtelois. Si les Bérochaux se sont logiquement baladés 16-1, l’attitude de l’actuel… 2e club de la hiérarchie cantonale derrière le monument Xamax (!) a rapidement fait le buzz négatif auprès des amateurs de foot des talus. Dimanche à Saint-Blaise, en marge du derby entre l’équipe locale et Marin, le sujet a monopolisé les discussions et il n’y a pas eu de débat, l’attitude du FC Coffrane étant désapprouvée par tous, avec plus ou moins de véhémence, selon les intervenants.
Comme à l’accoutumée, l’horaire dominical choisi par Saint-Blaise pour effectuer ses rencontres à domicile s’est révélé propice à un raout des footeux du bas du canton, et les langues étaient plus nombreuses à se délier au bord du terrain et à la buvette que lorsque l’on a demandé des réactions en vue d’un article sur littoralfoot. Toutefois, tout le monde n’a pas usé de la langue de bois à l’heure de s’exprimer officiellement. A l’issue de la rencontre entre Saint-Blaise et Marin, les entraîneurs des deux clubs ont accepté de parler du cas, tout comme les coaches de Bôle et de Cortaillod, venus en spectateurs (voir ci-dessous).
L’esprit du football trahi
Aux premières loges samedi, Michele Marques, co-entraîneur de Béroche-Gorgier, a été sollicité durant la semaine et a été d’accord de rembobiner la bande pour nous. «Je tiens par-dessus tout à louer l’attitude de l’entraîneur et des joueurs de Coffrane II présents samedi. Malgré les circonstances et le score improbable, ils ont été remarquables, chapeau à eux», a insisté en préambule l’entraîneur bérochal. «On avait senti le coup venir. Ils avaient essayé de déplacer le match. Mais comme on avait accepté d’avancer la rencontre aller et que sur le 11 titulaire, ils avaient aligné 10 joueurs de la première, on a refusé cette fois-ci. Leur coach nous a dit qu’il espérait pouvoir compléter son effectif avec des Juniors A, ce qui ne s’est apparemment pas produit.» Coiffant sa casquette de président du club, Michele Marques a poursuivi: «Ça fausse le championnat et trahit l’esprit du football. Une partie du public s’en est allée même avant la mi-temps, c’est grave au niveau de l’image. C’était un non-match. Déjà avant cela, chaque adversaire de Coffrane II se demandait quelle équipe il allait affronter. Maintenant c’est encore plus le flou. Bien sûr, la rumeur fait part d’un grand remue-ménage à la deux… Mais ça n’excuse pas tout.»
Un simple accident de parcours pour Coffrane
Contacté lui aussi, le directeur sportif de Coffrane, Bruno Valente, a justifié l’alignement de samedi dernier par des forfaits de dernière minute. Il a jugé «la situation exceptionnelle» et a souligné lui aussi «le courage affiché par l’entraîneur et les joueurs qui ont tenu à disputer la rencontre coûte que coûte.» Il s’est encore voulu rassurant quant à l’avenir de la deuxième garniture du club: «Je ne suis pas du tout inquiet pour la suite de la saison, même si l’effectif s’est un peu réduit dernièrement», a-t-il assuré. Tout juste l’ancien joueur professionnel a-t-il admis du bout des lèvres un problème structurel: «Si on a dû se présenter à un match en infériorité numérique, c’est forcément que notre contingent n’est pas assez fourni.»
L’ANF observe…
A l’ANF, on suit l’affaire de près, même si aucune infraction au règlement n’a pu être relevée. «Lorsque la «deux» de Coffrane s’est inclinée 6-1 en demi-finale de Coupe contre une 3e Ligue (ndlr: trois jours avant, contre Communal Le Locle), cela nous a rendus attentifs à la situation de la seconde garniture du club», a relevé Pascal Bégert, vice-président de l’association neuchâteloise, qui déplore, impuissant, la situation tout en assurant y jeter un oeil attentif. «Coffrane doit remplir ses obligations. On peut espérer que ses dirigeants trouvent très rapidement une solution acceptable pour y parvenir. La première équipe du club marche bien, à eux de maintenant faire en sorte que leur 2e garniture soit le plus compétitive possible. Ce n’est évidemment pas admissible de se présenter à 8 joueurs en 2e ligue.»
… Les adversaires fustigent
«C’est un peu scandaleux, mais il n’y a pas que Coffrane qui est dans ce cas, il y a aussi La Chaux-de-Fonds. On ne sait pas quelle équipe ces clubs vont mettre le week-end. Est-ce qu’il s’agira de juniors A ou de gens de la «une»? A un moment donné, ça fausse un peu le championnat, que ce soit pour nous ou pour ceux qui jouent le haut du classement. Je trouve dommage qu’il n’y ait pas un autre règlement en vigueur», a estimé José Fraga, entraîneur de Marin.
«C’est malheureux qu’on se présente à 8 puis à 9 en 2e ligue. Ca peut fausser le résultat du championnat car, à un moment, ils vont peut-être venir un week-end avec des joueurs de la première. Ça fausse vraiment la donne. Evidemment, je ne connais pas le fin de mot de l’histoire, pourquoi, alors qu’ils ont une première équipe, ils se sont présentés à 8. Ce n’est pas une bonne pub pour le football neuchâtelois», a réagi José Saiz, coach de Saint-Blaise.
L’image du foot neuchâtelois salie
«Ce 16-1 est une mauvaise image pour le foot neuchâtelois. C’est incompréhensible, il y a quelque chose qui ne va pas. Cela va à l’encontre des clubs qui ont des vrais mouvements juniors, qui s’investissent dans beaucoup de choses. L’image reflétée est plus que négative, scandaleuse. Cela va peut-être tuer des clubs qui jouent contre la relégation. C’est inacceptable. On se fout de la gueule des gens qui investissent du temps, qui doivent trouver des sponsors pour les panneaux autour de leur terrain pour payer des entraîneurs. Tout ça juste parce que certaines personnes jouent leur gloriole. Je n’aime pas ça. J’assume mes mots et si les gens veulent me contacter pour en parler, il n’y a pas de problème. C’est contraire au fair-play footballistique. Je suis dégoûté. C’est inhumain, irrespectueux, inacceptable. J’espère qu’il y aura des discussions à l’interne de l’ANF, parce qu’on ne peut pas continuer comme ça. Le foot neuchâtelois est en train de chuter. Et là c’est encore pire que tout», a déclaré Bruno Rupil, entraîneur de Bôle.
Une sorte d’arbitre corrompu
«Sur le match Béroche-Coffrane II, c’est clair que ce n’est pas normal de se présenter en infériorité numérique, autant faire forfait et payer 300 balles», a jugé Jorge Bastos, coach de Cortaillod. «Sur le cas plus général de la 2e équipe de Coffrane, c’est gênant. Elle officie un peu comme un arbitre corrompu du championnat. Ce n’est pas normal, encore moins pour les équipes qui jouent la promotion ou contre la relégation. Je ne vous cache pas que je vais tout faire pour essayer d’obtenir les points nécessaires à notre sauvetage avant d’affronter Coffrane II. Comme leur première équipe a avancé le derby de 1re ligue face à La Chaux-de-Fonds au jeudi et qu’on joue le dimanche, je peux m’imaginer qu’on n’affrontera pas la même équipe que celle qui a été alignée ces derniers temps. Même si c’est challengeant, c’est rageant de penser qu’on peut avoir affaire à une équipe du niveau de 2e ligue inter voire de 1re ligue, alors que d’autres ont affronté des Juniors A cantonaux ou un adversaire qui s’est présenté en infériorité numérique. Ça fausse le championnat et ce sont des clubs formateurs qui en font les frais. Si le FC Coffrane n’a pas les moyens d’aligner sa deuxième garniture en 2e ligue, peut-être qu’il devrait l’aligner en 3e ligue, où, par rapport au niveau, il est plus simple de compléter l’effectif avec des Juniors A».